Ahmed CHARAI
Un plan d’urgence a d’ailleurs été mis en place pour parer à la baisse des réservations constatées et contrecarrer l’assèchement de certains marchés émetteurs. De manière globale, l’économie marocaine a des atouts pouvant lui permettre d’atténuer les effets de la crise. Le secteur bancaire est très sain, la demande interne reste soutenue, en particulier pour l’immobilier, et l’année agricole s’annonce exceptionnelle. Cependant, les risques de contraction sont tout aussi réels pour le tourisme, pour les exportations de produits manufacturés ainsi que pour les transferts des MRE. Il faudra une vigilance accrue pour éviter une contagion de sinistrose et garder le chemin de la croissance. Mais une fois n’est pas coutume, c’est le champ politique qui va retenir l’attention. Les élections communales auront lieu en juin 2009, alors que le Maroc s’engage sur la voie de la régionalisation avancée. Les collectivités locales concentrent déjà des pouvoirs et des compétences importants. Le moins que l’on puisse dire est que l’usage qui en est fait n’est pas performant. La moralisation des élections, le refus de l’achat des voix est une exigence de tous les partis. Pourtant ces mêmes partis font la cour aux notables qui ont recours à ces pratiques. Le mode électoral, la proportionnelle absolue, favorise l’émiettement et donc les marchandages. La bonne nouvelle c’est que des alliances s’esquissent autour du PAM, avec le RNI et le Mouvement populaire, et entre l’USFP et l’Istiqlal. Ces alliances pourraient à la fois mobiliser l’électorat et permettre la sortie de majorités cohérentes des urnes, loin des marchandages du passé. C’est d’une importance vitale, non seulement pour la démocratie et son ancrage, mais pour le développement économique et social.
Solidarité : le talon d’Achille
Les dix dernières années ont été celles d’une croissance soutenue, grâce à l’investissement public et à l’essor de l’immobilier. Force est de constater que cette croissance n’a pas atténué la précarité. Des régions en sont totalement exclues et des couches sociales n’en voient que les miettes. En 2009, c’est sur le terrain de la solidarité que l’action publique sera jugée. L’accalmie sur le front des produits alimentaires et la baisse extraordinaire du prix du pétrole donnent une marge au gouvernement pour une action sociale plus enhardie. C’est une nécessité absolue pour mettre à niveau l’ensemble des régions.
Il est clair que sur le dossier du Sahara, malheureusement, il n’y a pas d’espoir de règlement rapide. Alger refuse la main tendue, malgré la pression de la communauté internationale. Pire, elle multiplie les provocations outrancières, au mépris des intérêts des peuples de toute la région. L’année qui s’ouvre sera celle d’un ballet diplomatique, pour imposer l’autonomie comme solution finale. Il n’est pas sûr du tout que cela se réalise aussi rapidement. Vigilance face à la crise économique mondiale, vigilance face aux incohérences de la classe politique, vigilance face aux insuffisances sociales et en fin vigilance face aux manœuvres algériennes, voilà ce qui nous attend pour 2009.
Maroc UE Le tournant historique
Grande évolution dans les relations entre le Maroc et l’UE en 2008 avec le statut avancé obtenu par le Maroc. Les relations n’ont jamais été aussi soutenues comme le dira Benita Ferrero Waldner, Commissaire européenne aux relations extérieures et à la politique de voisinage. Selon elle, « les relations entre le Maroc et l’Union européenne connaissent actuellement un développement soutenu. Il suffit d’examiner le développement des échanges commerciaux, financiers et touristiques pour se rendre compte du dynamisme actuel ». Au delà des échanges , l’UE et le Maroc «partagent une vision commune sur de très nombreux sujets et sont engagés dans de nombreux chantiers pour approfondir encore plus leurs relations». Surtout dans le domaine politique où le statut avancé se traduira par un « renforcement des mécanismes de concertation avec le Maroc, par exemple avec la possibilité d’organiser un Sommet UE-Maroc, d’inviter les représentants du Maroc à des réunions du Conseil des ministres de l’UE, ou à des groupes de travail du Conseil, ou pour associer plus étroitement le Maroc aux opérations de gestion des crises de l’UE « , souligne Benita Ferrero Waldner. Ceci implique tout un train de changements dans la politique extérieure marocaine et dans sa diplomatie.
2009 sera donc la première année d’expérimentation d’un certain nombre de mécanismes, tous très largement connus par les Marocains qui suivent de manière très minutieuse les avancées de l’UE et de ses institutions. Le Maroc exploitera la nouvelle «zone de libre échange approfondie et complète» et s’attaquera aux obstacles non tarifaires du commerce. Y trouvera-t-il le moyen de réduire son déficit commercial ou s’y enlisera-t-il davantage ? Tout dépendra des stratèges de l’export. Une feuille de route ambitieuse pour les années à venir est entre les mains des deux partenaires souligne la commissaire européenne.
UPM, UMA Deux chantiers à suivre
Deux constructions importantes sont en chantier. L’une dure depuis plus de 20 ans avec des travaux à l’arrêt, et l’autre vient d’être lancée avec une volonté assez manifeste. La première concerne l’Union du Maghreb Arabe (UMA), ou ce que certains appellent Union du Grand Maghreb. On en est toujours au point mort. Rien ne bouge. L’autre construction est l’Union pour la Méditerranée dans laquelle le Maroc s’est bien investi malgré des obstacles évidents. Qu’en sera-t-il en 2009 ? En tout cas on sait que « le non-Maghreb est un gâchis socio-économique », comme l’a dit le ministre des Affaires étrangères Taïeb Fassi Fihri lors du colloque « Maghreb 2030, partenariat euro-méditerranéen », organisé par le Haut Commissariat au plan. Si les pays de l’UMA veulent dynamiser cette structure, ils savent que la seule solution est que le Sahara retrouve sa place dans cette construction, c’est-à-dire une région marocaine.
Pour l’UPM, c’est encore le problème algérien auquel s’ajoute un autre plus grave encore, le conflit israélo palestinien. Là encore, les derniers raids sur les Palestiniens de Gaza qui ont fait jusqu’à maintenant plus de 370 morts, empêchent des pays arabes engagés dans l’UPM de s’assoir à la même table que les Israéliens, eux aussi dans l’UPM autant que les Palestiniens. En attendant, l’UMA devra comptabiliser encore ses pertes en 2009. Le non-Maghreb coûte 2 points de croissance annuelle aux cinq pays. A cause justement de la faiblesse des échanges. Le commerce intermaghrébin ne représente que 2% du total, alors que l’investissement intermaghrébin est négligeable. Plus encore, souligne Abdellatif Jouahri , le wali de Bank Al Maghrib, lors du même colloque, le non-Maghreb coûte aussi en emploi. Le taux de chômage moyen étant de 16%.