En dépit du ralentissement de ses marchés européens, le tourisme – l’un des secteurs économiques clés de la Tunisie et le deuxième plus grand employeur après l’agriculture – a montré une croissance régulière au cours des neuf premiers mois de 2008, avec des recettes records escomptés d’ici la fin de l’année.
Les chiffres officiels publiés le mois dernier ont montré que les recettes touristiques de la Tunisie ont augmenté de 9% sur un an pour atteindre environ 1.8 milliard de dollars sur les neuf premiers mois de 2008. Le Ministre du Tourisme, Khalil Lajimi, a déclaré à la presse locale la semaine dernière, qu’en tenant compte des variations saisonnières de la demande, il prévoyait, que les recettes du secteur augmentent de 8% pour atteindre un chiffre record de 2.4 milliards de dollars, d’ici la fin de l’année, comparativement aux 2,2 milliards en 2007.
La croissance du chiffre d’affaires a dépassé l’augmentation modeste du nombre de visiteurs, qui – en phase avec les chiffres annuels précédant – a augmenté d’environ 3% en 2008 à près de 5.6 millions à ce jour. Lajimi a déclaré qu’il était optimiste quant à l’augmentation du chiffre pour atteindre 7 millions de touristes d’ici la fin 2008.
En comparant ces chiffres, 2007 a enregistré un total de 6.7 millions de visiteurs, 3,2% de plus qu’en 2006. La grande majorité des visiteurs viennent des pays voisins tels que la Libye et l’Algérie. En 2007, environ 2 millions de touristes provenant de ces deux pays ont traversé la frontière.
Le secteur du tourisme, qui constitue également pour la Tunisie la plus grande source de revenu en devises étrangères, emploie près de 16,6% de la main-d’oeuvre tunisienne avec plus de 500.000 emplois en 2008. Grace au flux de visiteurs et à un environnement économique stable, l’industrie représente également une des principales attractions pour l’investissement étranger direct (IED) dans le pays. En plus du secteur de l’immobilier, l’IDE dans le secteur du tourisme a bondi, au cours des neuf premiers mois de 2008, pour atteindre le chiffre impressionnant de 183.6 millions de dinars tunisiens (133.8 millions de dollars), comparativement aux 8.2 millions de l’année d’avant, avec l’augmentation spectaculaire due en partie au lancement de plusieurs projets de grande envergure ainsi que de l’expansion de divers hôtels.
Le tourisme contribue directement à près de 7% de l’ensemble du produit intérieur brut (PIB). Toutefois, selon le Conseil Mondial du Tourisme (WTTC), lorsque l’impact total du secteur sur la croissance économique est pris en compte, le tourisme ainsi que les recettes affiliées atteignent 17,7% du PIB total de la Tunisie, ce qui représente 8.65 milliards de dinars tunisiens.
Alors que l’économie de la Tunisie est relativement protégée contre les pires excès de la crise financière actuelle, le tourisme devrait être l’un des secteurs les plus vulnérables. Bien que les visiteurs du Maghreb constituent la plus grande partie du flux touristiques en Tunisie, les clients européens restent également réguliers, en particulier ceux de la France (1,3 million de visiteurs en 2007), d’Allemagne (514000 visiteurs), d’Italie (440000) et du Royaume-Uni (312000 ) – qui ont tous connu une baisse de leur pouvoir d’achat au cours des derniers mois. ?tant donné que le nombre de visiteurs européens était déjà à la baisse avant la crise – le nombre de visiteurs allemands, par exemple, a diminué de 6% en 2007, tandis que le nombre de visiteurs italiens a baissé de 4,3% – ceci-ci a évidemment touché le secteur du tourisme du pays et celui-ci est préoccupé par sa croissance future.
Selon Lajimi, l’impact du ralentissement de l’économie se fera tôt ou tard sentir en Tunisie, mais le Gouvernement travaille déjà à trouver des mesures pour contrer la baisse attendue de la demande. Ses efforts comprennent ceux de la promotion pour aider à améliorer la visibilité du secteur, avec une série de programmes de modernisation qui ont déjà été mis en place pour les 800 hôtels du pays. En effet, en début d’année, 19 hôtels et deux restaurants touristiques ont été fermés en raison d’un non-respect des normes de base, tandis que plusieurs autres ont vu leur classification officielle déclassée.
Selon les estimations du WTTC, les programs devraient être mis en oeuvre avec succès, le tourisme et ses contributions au PIB augmenteront de plus de 9 milliards de dinars tunisiens pour atteindre 17,94 milliards de dinars tunisiens en 2018, tandis que le nombre d’emplois dans le secteur s’élèvera à plus de 620.000.
Bien sûr, la Tunisie est loin d’être le seul marché du tourisme a être affecté par la crise financière. Après avoir connu un début d’année dynamique, les chiffres du tourisme mondial sont passés de 5,7% sur un an de croissance au cours des quatre premiers mois de 2008 à moins de 2% cet été.
La Tunisie cherche à modifier la structure de son secteur touristique pour mieux faire face aux rigueurs du ralentissement mondial, ainsi que l’augmentation de la concurrence régionale provenant du Maroc et de la Turquie. Depuis les années 70, la Tunisie a été l’un des principaux marchés du tourisme de masse, avec un marché qui dépend fortement des tour-opérateurs et des groupes de package en gros. Bien que cela ait lancé le pays dans son rôle de première destination touristique, il eut un impact négatif sur sa viabilité et ses perspectives de croissance. ?tant donné que les voyages à forfait passent rarement en dehors de leurs itinéraires prescrits, liées au tourisme, les recettes sont limitées et la demande est souvent limitée par la saisonnalité. Le revenu par tête en Tunisie est d’environ 333 dollars, alors que le Maroc – qui est considéré comme une destination plus haut de gamme – perçoit environ 1040 dollars par tête. De même, l’Egypte reçoit environ 850 dollars par tête.
Dans une tentative d’aller au-delà du modèle de tourisme de masse, la Tunisie a commencé à renforcer ses marchés de niche, en particulier dans le tourisme médical. Le pays possède déjà un personnel hautement qualifié dans le secteur des services de santé, accueillant prés de 150.000 étrangers dans ses centres de thalassothérapie en 2006 en plus des 75000 visiteurs dans ses différentes cliniques médicales en 2007. Bien que la majorité des patients viennent des pays voisins du Maghreb, de plus en plus nombreux viennent de l’Europe, et cherchant à profiter des prix bas et de services comparables pour un grand nombre d’opérations allant de la chirurgie cardiovasculaire à des opérations esthétiques. Avec un tourisme médical mondial évalué actuellement à 60 milliards de dollars, selon un récent rapport publié par Deloitte, un bureau de consulting, la Tunisie cherche à accroître sa part du gâteau en investissant massivement dans de nouveaux projets de tourisme médical, et en offrant des allégements fiscaux généreux et en réduisant les droits de taxe d »importation pour les investisseurs privés.